Ego
- J’affirme
mon « je » comme unique, insoluble dans le « on »-et le
café. Mon « je » dénoue le nœud qui le noue aux jeux des nous. Je
hais le nous !
Voix off : Traduction : « Vive Moi !».
Ego
-J’affirme ma singularité. Je
suis Enfant Unique. J’insiste. UNIQUE. Et par la force du destin je conserve de
ma filiation quelques gênes qui me gênent. Je ne supporte pas la comparaison.
Un jumeau ? Non ! Ou alors hétérozygote ! Pas de place pour deux
ego dans mon petit œuf et puis je zygote trop. Impossible ! D’ailleurs
singulier est je. Jeu de scène. Contraire à ce pluriel de masse détestable.
Voix
off : Tu l’auras
compris. Cet ego est plus gros et vorace que la célèbre grenouille de la fable.
En chemin il rencontre un jeune et beau garçon plutôt servile. Tu vas voir.
Le jeune
et beau garçon (Tu connaîtras son nom plus loin)
- Ô toi, Ego sans mesure – et
sans mentir! Comme tu me parais beau! Si ta langue est fille de ton bide, tu es
à la connerie ce que l’éclat est au diamant! Ô Digne descendant des princes les
plus illustres, je me prosterne devant ta royale épaisseur! Ô toi fils d’Ubu le
roi !
Ego
grossi par la « louange »
-Relève-toi ! Qui est celui
qui me connaît si bien ?
Voix off
chuchote à ton oreille : quand même considérer ça comme un
compliment!
-Je suis CPU-Face-de-Bouc, le
regard qui t’admire. Les mains qui t’applaudissent. La voix qui chante Ta
Nombrilité. Bien plus qu’un fidèle reflet je suis l’image que ton rêve modèle,
que ton désir sécrète. Demande moi ce que tu veux et je l’exécuterai.
Voix
off : en gros c’est une machine à reluire.
Ego
-Je veux manger les plus grands
de ce monde ! Exhume les Picasso, les Cézar, Hendrix et Mozart !
Cuisine pour moi les chairs les plus talentueuses ! Que je devienne
l’Ultime Tzarafouchtra !
CPU
- Ton désir est ma loi ! Ô
mon roi.
Sa Majesté l’Unique se reput.
Appela :
- CPU-Face-De-Bouc !
- Ô Noble Bide, je t’ai servi les
grands les plus grands. Que veux-tu maintenant ?
- Il y a dans le monde des gens
qui pensent et courent et rient et resplendissent ! Cela me met en
appétit !
- Qu’il soit fait selon ta
volonté.
Ainsi dit-il, ainsi fit-il, ainsi
il se goinfra.
Ego-roi digéra. Difficilement.
Dans un long sommeil.
A son réveil Silence et Néant
assiégeaient le palais. Il appela son fidèle reflet.
Voix
off : ce gars parle bizarre. J’aurais dit : A force de manger de
l’homme, le bonhomme va se retrouver tout seul!
Alors, adieu gloire et célébrité. Restera que le fidèle CPU, le miroir informatisé,
la machine à bravo.
- Il nous faut rompre le siège.
Il me faut plus de force ! Je veux de la chair d’hommes. Des fans, de la virilité
de la pugnacité, de la plasticité pleins ma panse!
- Majestueuse Boulimie. Nous
sommes entourés d’un rien omniprésent. Vous avez tout dévoré. Il ne reste que
vous et moi, mon roi.
-Et bien je t’avale. Je veux me
régaler de ta fidélité !
Ainsi dit-il, ainsi fit-il, ainsi
il se goinfra.
Il dormit.
A son réveil, Silence et Néant
étaient rois.
Il appela. Vainement. Se
lamenta :
-Unique. J’étais l’enfant du
Singulier. Farouche détracteur du nous qui enlace le je dans sa trame! Où es-tu
mon nous qui me loue pour mon jeu de scène. Où es-tu mon fidèle CPU, mon
reflet ? J’ai faim. Faim de vous, faim de Moi !
Ainsi dit-il, ainsi fit-il.
Et il mourut dévoré par son
propre nombril.
Voix off : ça me rappelle
une vieille histoire qui a mal fini aussi... Le bellâtre amoureux de son propre
reflet. Il n’avait pas compris que c’était lui. Trompé par une flaque
d’eau ! Il n’a pas supporté !
© texte propriété Joel Carayon
JoelC
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