lundi 16 novembre 2015

Pèlerinage

Peut-être existe-t-il un tiers au delà mais pas de l'espèce que nous décrivent toutes les prophéties. Dieu ne nous a rien fait directement mais ses églises, ses sectes et tous ceux qui se prétendent élus avec ou sans barbe ont fait preuve d'une grande créativité pour nous maintenir le bec dans l'eau, l'au delà bien sûr. Et les prophètes sont à la religion ce que les grands cuisiniers sont à nos petits plats. 
 
Que dire de nos chevaliers de robe politique qui brandissent leur bla bla bla comme des armes, aguichent les troupeaux moutonneux que nous sommes à coups d’œillades sécuritaires et plus on parle de nous protéger et plus ça me fait peur et plus j'ai mal au cœur. Nos guignols gesticulent, crient aux scandales, déversent leur flots de haine personnelle. Religieux, politiques même combat dirait-on. 
 
"Mon petit, faut qu'ils vivent" répondra La Voix qui résonne sous mon capot. Elle en a de bonnes. A sa décharge elle instille une grande dose de cynisme dans le fond de ses remarques. Reconnaissons le, il doit bien avoir des purs sous les soutanes, quelques doux dingues aux convictions sincères dans les temples de prière ou les fabriques de nos idées, idéaux démocratiques. On les entends bien mal et la sagesse d'ici bas ou d'en haut se dissout dans les professions de mauvaises fois. Ça couvre à grands cris leur petites voix. 
 
Je ne communierai pas avec les braillards. Tous ont tellement de sang sur leurs prières. Aujourd'hui pas plus que demain et pas moins qu'hier, nous partagerons notre pain quotidien sans calcul, sans aucune équation qui viserait l'égalité entre ce que nous donnons et ce que nous recevrons dans la nébuleuse d'une après vie, pas après mort non, après vie parce que la vie est et ça suffit.

Aujourd'hui bien plus qu'hier encore, allez donc savoir pourquoi, partir en croisade armé de la volonté indéfectible de jouir. Saluer la vie encore et encore, se laisser pénétrer de ses courants d'air, la laisser introduire en nous la douceur d'une gorgée de café au réveil, marcher dans nos villes, nos campagnes sans crier aux armes citoyens, célébrer le ciel et la mer tous les jours face tournée vers l'est le matin et l'ouest au couchant. Aimer le calme et son silence, guetter la musicalité du quotidien dans la chanson du tram, le ronronnement du matin, contempler, aimer, vénérer la danse de l'ordinaire pour en extraire l'essence unique. Pourquoi la légèreté de l'être ne se goûte jamais autant que sous la menace ?

Être riche de ce que le jour nous donne, riche désespérément, riche de sa vigueur parce que nous connaissons trop la fragilité, la précarité de ce qu'elle construit, qu'elle arrache au néant qu'elle bâtit sur le chaos. Nous marcherons seuls dans nos rues, nos chemins, la tête en l'air, l'esprit aux aguets prêt à s'ouvrir au moindre chant d'oiseau, au moindre frôlement d'une robe, à ta moindre caresse ma compagne, mon amie si chère, à ton premier gazouillis de bébé ma petite fille, à ton sourire de maman, ma fille, vous tous qui partagez le quotidien de nos pensées et toi aussi qui promène ta canne et ton gobelet à chaque feu rouge, mendiant soupçonnable ou toi encore dont nous croiserons le regard, toi qui nous sortira de l'anonymat par un bonjour, un vrai avec les yeux dans les yeux.

Nous marcherons, nous nous exposerons à vos éclats de rire, à la mitraille de vos printemps, nous exploserons de joie avec l'urgence de celui qui se sait mortel. 



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