vendredi 18 octobre 2013

Immondes

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-Tu te rappelles la petite rivière de notre  enfance où nous allions pêcher  nos souvenirs d’adultes vieillissants ? Elle sifflotait son insouciance entre des galets arrondis à la douceur de l’été.


-Et les arbres penchaient tendrement leur feuillage au-dessus d’elle. On attrapait des rêves dans la gaieté de nos après-midi. Les poissons se moquaient de nos lignes rafistolées, tournaient autour de nos hameçons. Mais seuls les plus désespérés gobaient nos appâts mal façonnés.

-Plus tard les hautes herbes de juillet ont caché nos caresses, encouragé nos ébats de leurs rires bleus et rouges où chantait à tue-tête notre adolescence.

- L’eau a coulé sous nos âges. Aujourd’hui nous observe de son œil de plomb, roule son huile et ses carcasses rouillées dans un mince filet nacré. Brillante de ses papillons en papier gras elle grogne, rote dans sa prairie fleurie  des  vestiges de nos boulimies.

-Et les enfants d’aujourd’hui courent sur les restes d’ortolans, cueillent les fleurs de gravats ou s’émerveillent  devant  les dépouilles pitoyables d’anciennes machines à penser. Au-dessus le tumulte d’un vol de rieuses plonge violemment au cœur de ce paysage.

-Là. L’esprit de l’eau s’éveille, s’ébroue, expose son corps dénudé, lance son chant rockailleux. Néo-sirène pose devant l’enfance enchantée. Bat de ses longs cils de ferraille, roule des yeux maquillés aux  tessons de bouteilles, exhibe sa nudité de plastique défloré.


-On n’arrête pas le progrès !

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