Je
ne m'appelle pas Ulysse mais je viens de pays voisins animé du désir
profond de trouver une nouvelle terre pour les miens. Je navigue sur
les mêmes routes que lui à quelques siècles d'intervalles. Il
cherchait sa Pénélope et son Ithaque moi je quitte ce que j'aimais,
ma ville, ma musique, mes parents poussé par l'avancée des
sanguinaires et si je traverse le flot de tous les dangers derrière
mes guides que la vie humaine indiffère c'est pour m'arrêter auprès
de toi vieille Europe que tu le veuilles ou non. Tu n'as pas plus le
choix que moi.
Que
la mer nous porte ou nous engloutisse nous viendrons. Et si tu nous
repousses nous repasserons. Nous naviguons dans les cales et sur les
ponts de vieux cercueils en métal rouillés nous sommes des
centaines à chaque traversée dans les yeux la crainte et l'espoir.
Fatalement nous venons dans vos villes dans vos rues sur vos yeux
posés comme des mendiants fatalement nous nous déversons de vagues
en vagues, écume blanche et rouge à la fois, fatalement nous nous
mélangerons à vous fatalement, fatalement.