vendredi 12 juin 2015

Tigres de papier




Je joue l'eau, la forêt, je joue les arbres et les animaux, je joue la fleur que le printemps ravivera, je joue la douceur de mon climat. Je mise sur la vie et sur la mort aussi, je joue avec la vie, je joue, je me joue de tout.

J'achète du sourire, du fer, du poumon, du cuivre, des corps, des bras. Je prends je vends des hommes, des terres,de l'eau, de l'air, du vent.

Je prends.

Combien pour le risque, le dommage, les ravages, combien pour fermer les yeux, combien pour la vie des uns et la mort des autres.

Jouer pour le vertige du gain immédiat, pour un peu plus de monnaie, de verts tigres de papier qui effeuillent nos arbres plus fort que l'hiver. Vert de l'illusion, produit de la terre, papier contre nature, contre partie de ce que j'engage mais qui ne m'appartient pas.

Dans les coulisses de nos marchés, les tigres de papier, l'envers des sourires rassurants qui me parlent sur un ton joliment dit poli, la vibration d'une langue qui ruine nos âmes comme science sans conscience. 

Je joue je mise j'amasse ou je perds sur ce grand tapis vert où ma roulette est une terre bleue dans son univers silencieux.

Texte, © Joël Carayon