Poème de Jean Gelbseiden
C’est
une pauv’ âme presque nue
dans
l’quartier du coin d’la rue
au
regard près d’ l’ hébétude
affaissée
sur sa solitude.
Tout
près d’elle une bouteille
dernier
compagnon d’chaleur
qu’elle
serre jalouse contre son cœur
à
l’abri des passants sans oreilles
Et
sans plus d’yeux d’ailleurs
pour
conjurer l’malheur
de
cette exclue d’la première heure
Elle
a quasi plus faim
cette
pauvresse
qu’aucune
parole ne berce
Elle
a quasi plus d’dents
dont
elle puisse mordre
le
monde qui passe indifférent
Elle
a quasi plus d’seins
plus
d’rêves de mère…
donner
son lait quand on a rien ?
Elle
n’a plus d’gants
ni
plus d’chaussures
et
plus d’ses doigts que des eng’lures
Enfin
pus rien qui soit du jour ;
elle
ne vit plus que dans l’espoir
d’un
passant qui daigne la voir
avec
aux lèvres un mot d’amour
avec
au cœur du réconfort
qui
l’aide à s’batt’ contre la mort
Sans
doute alors qu’ du chaud l’envahirait
et
qu’ l’appétit lui r’viendrait…
que
sur sa bouche édentée
ses
lèvres s’entr’ouvriraient
pour
nous faire voir qu’il y a bien pire
que
d’avoir enfin envie d’sourire