Les années ont tagué leur texte sur ma peau et je porte au front le sillon d’un socle qui n’a rien
d’agraire : une calligraphie fine et profonde trempée à l’encre des rires
et des larmes. L’agri- sculpteur y
cultive une histoire singulière mais bien ordinaire pourtant, avec ses fruits
doux- amers : des rêves d’hier plantés dans la peau.
Visiteur- tu peux bien involontairement y lire les
accidents et les silences, les renoncements, les échecs. Mais si tu sais te perdre entre ces lignes de plus
en plus serrées, tu découvriras peut être la chanson d’une source fraîche et
discrète, gambadant dans la voix d’un enfant. Au zénith un œil de feu dans un
désert de bleu. Puis le goût du corps aimé drapé de l’ombre étroite du cyprès,
à la cime lancée vers le haut comme un cri prolongé vers la vie.
Là, les
racines plongent dans la froide
obscurité des tombes. Le sombre gagne sur la lumière, et l’histoire se fait
menaçant orage tournoyant au-dessus de sa vallée. Y gronde le mystère d’une
destinée gravée en écritures anciennes vierges de tout déchiffrement. Peut-être
le lecteur d’âme y trouvera-t- il sa pierre de rosette et
donnera à cette terre de
noirceur, un ciel plus flatteur.
Ma peau est une page d’écriture dont les rides
sont le langage et ma vie la grammaire.